Êtes-vous heureux, décembre 1998

Affaires Plus – Décembre 1998

ÊTES-VOUS HEUREUX?

Par Nicole Côté

 

Un jour, dans l’avion de Mont-Joli à Québec, mon voisin de siège, qui lisait «Les passages de la vie» de Gail Sheehy, m’aborde en me demandant qui j’étais.

Après avoir décliné mon Ph.D. en psychologie, mon métier de consultante internationale et mon passé de professeure d’université, je lui mentionne que j’ai une fille de 23 ans. Il me demande tout simplement : «Est-elle heureuse?» Quel choc!

En effet, quand on décrit un individu, c’est très souvent à partir de paramètres extérieurs à lui-même. Que fait-il? Qu’a-t-il accompli? Dans quel environnement? À quel niveau? Avec quel succès? On oublie de se demander : Que devient-il? À quel prix? Avec quel plaisir? Dans quel but? Au nom de quoi? Ce sont pourtant ces dernières questions qui nous permettent d’évaluer le succès d’une vie, d’en saisir l’essence et le sens.

Il y a deux recettes principales pour être heureux.   La première, c’est de vivre entouré de gens que l’on aime. La seconde, c’est d’être payé pour exercer un métier qui nous passionne. Et si la plupart des gens affirment que leurs amours et leur famille sont ce qu’il y a de plus important, c’est souvent la carrière qui mobilise la plus grande part de leur temps et de leur énergie. Ceux qui sont ambitieux, celles qui accordent beaucoup d’importance à leur carrière comptent sur leur travail pour satisfaire de nombreux besoins. On travaille pour plusieurs raisons :

  • pour gagner sa vie;
  • pour faire quelque chose d’utile et d’agréable;
  • pour rencontrer des personnes intéressantes;
  • pour développer ses talents;
  • pour réaliser des projets;
  • pour contribuer à l’évolution de la société.

C’est dire qu’une carrière bien menée devrait théoriquement apporter sécurité, autonomie, plaisir, harmonie, croissance et rayonnement. Dans une telle perspective, qu’est-ce qu’une belle évolution de carrière?

Est-ce passer de simple soldat à général? De 35 heures/semaine à 70 heures/semaine? De 7 500 à 75 000 dollars, et à 750 000 dollars? De Lévis à Paris?

Une bonne progression professionnelle devrait nous permettre, en plus d’avoir une certaine assurance matérielle, de faire des choses que l’on aime la plupart du temps, d’être de plus en plus libre, de devenir une meilleure personne, d’obtenir de bons résultats, d’être créatif, de côtoyer des gens que l’on estime, d’apporter aux autres, de les aider à grandir et être heureux, et de construire un monde meilleur.

Pourtant, dans l’univers corporatif où plusieurs personnes fort douées et bien intentionnées passent plus de la moitié de leur vie éveillée, on rencontre trop souvent des gens fatigués, stressés, qui ne s’appartiennent plus, ne rient plus, ne sont pas toujours des exemples à suivre et parfois même rendent les autres fous. Et ce n’est pas ce qu’ils voulaient au départ, ce n’est pas ce qu’ils affirment vouloir pour eux-mêmes et pour les autres. Ce n’est pas ce qu’ils méritent.

 

Douze facettes en 1999

Comment garder le feu sacré sans se brûler? Comment ne pas sacrifier la qualité à la quantité? Comment avoir une carrière à la fois prestigieuse et heureuse, gratifiante et généreuse?

Au cours de la prochaine année, nous présenterons douze facettes de la réussite personnelle, en tenant compte de plusieurs pôles : les résultats et la satisfaction, l’opportunité et la nécessité, l’action et la réflexion, la vie publique et la vie intérieure!

Nous verrons que l’on devrait construire sa carrière comme on élève un enfant. Quand un enfant vient au monde, on ne lui fait pas un plan de vie. On ne le fait pas souffrir dans le but de le rendre heureux plus tard. On prend le temps de le connaître, on l’aime et on l’aide à grandir dans l’équilibre, le plaisir et l’harmonie. On s’en occupe, on le stimule, on lui consacre du temps, on ne le perd jamais de vue. Enfin, on lui enseigne à devenir de plus en plus conscient et responsable face à lui-même.

En attendant le début de 1999, posez-vous ces questions : suis-je heureux? est-ce que je rends les autres heureux? Si oui, prenez conscience des clés de votre bonheur, de votre succès et de votre influence bénéfique sur les autres, et continuez. Si non, prenez le temps de voir ce qui ne va pas et commencez à vous occuper de vous-même.

Car la réussite personnelle, ce n’est pas comme la grâce sanctifiante. Elle ne vous tombera pas dessus la nuit de Noël. Vous la gagnerez jour après jour avec de l’amour, de l’attention, de l’intelligence, de la discipline et de la patience!