Faire ses quatre volontés

Affaires Plus – Octobre 1999
Faire ses quatre volontés
Par Nicole Côté

Il existe deux types de personnes : celles qui provoquent les événements et celles qui les subissent.

Au moment où l’humanité s’apprête à prendre un coup de vieux, je me rappelle ma tante préférée qui, lors de son soixantième anniversaire m’a dit : «Pour moi, le seul moyen d’accepter de vieillir, c’est de faire mes quatre volontés.»  Ma tante a été l’une des personnes les plus évoluées, les plus «réussies» que j’ai connues.  Sa vie n’a pas toujours été facile, elle n’aurait pas gagné tous les concours de popularité mais, contre vents et marées, elle a mené sa vie comme elle l’entendait.
Faire ses quatre volontés, c’est diriger sa vie en fonction de ses rêves, de ses capacités, de ses désirs et de ses valeurs.  À une époque très récente, il pouvait sembler facile de programmer sa vie et d’entreprendre sa réussite.  Mais, en cette fin de millénaire, avec les pressions économiques engendrées par la mondialisation, avec la turbulence qui accompagne les transformations technologiques et sociales que nous subissons, est-il encore possible, est-il même souhaitable d’aspirer à vivre selon ses quatre volontés?
À mon avis, c’est non seulement souhaitable mais indispensable.  Car, lorsque tout bouge, c’est à l’intérieur de soi qu’il faut trouver sa stabilité, sa sécurité et son centre de direction.  Ceux qui se laissent bousculer par les événements risquent de souffrir d’angoisse et d’épuisement, ou tout simplement de se perdre.
Il est possible d’arriver à être le leader de sa propre vie… à la condition de faire des choix clairs, de dire oui à certaines attitudes et non à d’autres.  C’est en ces termes que l’on peut énoncer les lois de la réussite des années 2000.

Dire oui…
– À l’ouverture sur le monde, en se tenant informé, en ayant l’élégance de se familiariser avec les nouvelles technologies, en se connectant à des réseaux professionnels et personnels.
– À la compréhension de son environnement, ce qui implique de savoir décoder les situations, de communiquer de façon pertinente et efficace, et de s’adapter en permanence.
– À l’actualisation de ses compétences, ce qui nécessite d’évaluer ses acquis, de se définir comme généraliste ou spécialiste, de tenir à jour ses connaissances et ses habiletés, et même de prendre de l’avance.
– À la nécessité de s’occuper de son marketing personnel, en apprenant à capter l’attention, en prenant soin de son image, en établissant sa propre crédibilité et en maximisant son impact.
– À l’autonomie psychologique et financière, en étant à la hauteur de son potentiel et en vivant selon ses moyens.
– À la liberté, à la créativité et aux ouvertures qui accompagnent toujours les grands bouleversements.
– À l’exigence d’être en forme et performant car, en période difficile, l’énergie et la capacité d’agir sont des alliées inestimables.

Dire non…
– À la semaine de 70 heures, à ceux qui organisent des petits-déjeuners d’affaires le samedi, à ceux qui vous font sentir coupables d’être malade, enceinte ou en vacances, à ceux qui vous pénalisent si vous prenez des cours d’anglais pendant des heures ouvrables.
– À ceux qui vous font des offres que vous ne pouvez refuser.  Ceux-là confondent esclavagisme et loyauté… et voudront sûrement en avoir pour leur argent.
– À ceux qui prétendent que la qualité est plus importante que la quantité.  Avec ces gens, on se retrouve invariablement avec très peu.
– À l’illusion de la perfection, qui enchaîne et infériorise plus que le pire des bourreaux.
– À l’intrusion de la technologie dans votre vie privée, ce qui vous empêche de décrocher et de jouir des petites et grandes douceurs de la vie.
– Au manque de reconnaissance.  Il importe de vous défendre contre ceux qui vous tiennent pour acquis ou n’ont pas la décence de dire «merci».  Mais, puisqu’ils ne se rendent pas compte de ce que vous faites, risquez-vous à faire ce que vous voulez.  Ils ne s’en apercevront probablement pas !
Lorsque nous y réfléchissons, il est difficile de faire nos quatre volontés dans nos organisations, souvent excitantes mais malheureusement de plus en plus inhumaines.  C’est un programme exigeant qui nécessite beaucoup de… volonté.  Toutefois, cela vaut la peine de s’y engager et de persévérer, car les bénéfices en sont nombreux et incommensurables.
Affrontons donc allègrement le «bogue» de l’an 2000, secouons-nous les «puces» et assumons le leadership de notre propre vie