Affaires Plus – Août 2001
Par Nicole Côté
Deux styles différents d’apprentissage et de fonctionnement.
Lorsqu’on prend une décision, on a besoin de sa tête pour faire la synthèse des informations disponibles, de son cœur pour mobiliser de l’énergie et de ses tripes pour passer à l’action. Ces trois instances sont essentielles à un fonctionnement normal, mais leur importance dans la gestion des priorités varie selon qu’on est actif ou réactif.
Pour l’actif, c’est le système d’information qui a la priorité. Il a besoin de réfléchir avant d’agir. Pour le réactif, la locomotive est l’action. Il réagit très rapidement et c’est dans le feu de l’action que ses idées surgissent.
Cette distinction entre actif et réactif est élémentaire, mais elle implique des styles d’apprentissage, des modes d’organisations qu’il est intéressant de connaître si on veut bien comprendre et encadrer ses ressources humaines.
L’apprentissage
L’actif aime disposer de toute l’information nécessaire et considérer plusieurs hypothèses avant de se lancer dans la mêlée. Il veut savoir où il va et comment s’y rendre. Il a besoin de planifier et son efficacité dépend de sa capacité d’être prêt à l’avance. Il est lent à démarrer, mais lorsqu’il passe à l’action, il peut tout régler la même journée. On le compare à un tireur d’élite.
Le réactif est plutôt un mitrailleur. Il apprend par essai-erreur et est un excellent improvisateur. Il adore fonctionner sous pression. C’est pourquoi il attend toujours à la dernière minute pour entreprendre ce qu’il a à faire. C’est dans l’urgence et l’intensité qu’il trouve ses meilleures idées.
Le fonctionnement au quotidien
L’actif aime que sa journée soit préparée à l’avance et qu’elle se déroule comme prévu. Il a besoin d’avoir à l’esprit l’ensemble de ses dossiers et aime sentir qu’il avance dans le sens de ses objectifs. Lorsqu’il a pu réserver du temps pour les imprévus et préparer sa journée du lendemain, il se dit avec satisfaction : « Tout est sous contrôle. »
Le réactif décrit sa journée idéale en ces termes : « il y a eu des tas d’imprévus, j’ai éteint plusieurs feux, je n’ai pas vu la journée passer et j’ai réglé un cas qui traînait depuis longtemps.»
Les cours classiques de gestion du temps ont été conçus par des actifs, pour des actifs. Pourtant, les réactifs sont de grands acheteurs de ces produits. Le réactif type s’inscrit, soit parce que son actif de patron lui a fortement suggéré, soit parce qu’il rêve un jour de ne plus être à la dernière minute. Il suit le cours avec enthousiasme et achète le gros cahier qu’on lui propose. À son retour, il en parle à tout le monde, passe sa semaine à remplir ses fiches. Puis, la semaine d’ensuite, il range son cahier dans sa bibliothèque et recommence à fonctionner comme avant : just in time.
Les besoins de supervision
Lorsque l’on dirige un actif, il faut prendre le temps de bien l’informer au début des projets, de répondre à ses questions, de discuter à fond du quoi, du pourquoi et du comment. Lorsque son besoin d’information est satisfait, il travaille de manière autonome, dérange rarement son patron qu’il aime rencontrer pour des mises au point périodiques. Pour lui, le patron idéal est celui qui sait où il va, communique bien sa vision, sait écouter et déléguer.
À cause de sa propension à passer rapidement à l’action, le réactif a une très faible capacité d’écoute. C’est pourquoi il est inutile de le submerger d’information. Il faut aller à l’essentiel, lui donner un objectif précis, lui épargner les détails et laisser aller. Il amorcera son projet et reviendra lui-même chercher des compléments d’information au besoin. D’ailleurs, quand on lui demande de décrire le patron idéal, il répond invariablement, «celui ou celle qui ne me dérange jamais, mais que moi, je peux déranger n’importe quand.»
À propos des faiblesses, celle de l’actif est d’oublier parfois de dire les choses. Pour lui, la phase la plus importante d’une opération est la réflexion. Et lorsqu’il en arrive à décider d’un plan, il a facilement l’illusion que l’humanité devrait être au courant. Il faut donc l’encourager à parler.
La voie de l’évolution
Un des principes fondamentaux d’un coaching efficace est de ne jamais demander à quelqu’un de changer son style. Il est aussi inutile de pousser un actif ou de retenir un réactif que de contrarier un gaucher. Il est donc sage d’encourager l’actif à être aussi actif que possible, à se donner du temps de préparation, à remettre ses décisions au lendemain, à prendre soin de son besoin d’information. Et lorsqu’il est prêt à toute éventualité, il se permet d’être spontané et… de réagir.
Au réactif, on suggère de suivre ses tripes. Le réactif qui se respecte règle les choses l’une après l’autre à mesure qu’elles se présentent. Dans le doute, on lui dit de plonger. Quand sa liste de choses à faire est vide, il lui reste du temps pour visionner et planifier.